[CITERADIO] Interview – Gabriel Aubert – Président de Radio Rennes : une radio libre, bretonne et essentielle – Fête de la Radio 2025 – 21 mai 2025

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À l’occasion de la Fête de la radio, CITERADIO est allé à la rencontre de Radio Rennes, l’une des plus anciennes radios associatives de Bretagne. Pour évoquer son histoire, son fonctionnement et sa vision de l’avenir des radios locales, nous avons interviewé Gabriel Aubert, président et cofondateur de la station depuis plus de 40 ans.

Une aventure née en 1981

Radio Rennes voit officiellement le jour le mercredi 20 mai 1981, sous l’impulsion de Gabriel Aubert et d’une équipe de passionnés, dans le café-théâtre qu’il tenait alors à Rennes. Dès les débuts, la technique était de mise : l’émetteur fut conçu par un ingénieur de Supélec, Patrice Roussel.

Mais à peine dix minutes après sa première diffusion à 17h10, l’antenne est brouillée par TDF (Télédiffusion de France). Ce brouillage se reproduira chaque jour jusqu’en septembre 1981, date à laquelle le gouvernement Mitterrand, par l’intermédiaire de Georges Fillioud, met fin à cette censure. Une libération salutaire pour les radios libres, dont Radio Rennes est un emblème.

Une structure humaine et engagée

Aujourd’hui, la station fonctionne avec deux salariés permanents, contre quatre auparavant, une baisse due à la raréfaction des subventions et des dispositifs d’aide à l’emploi. Mais le cœur battant de la radio, ce sont ses 35 bénévoles. Ils assurent la quasi-totalité de la production, de 7h30 à minuit, avec des rediffusions durant la nuit.

La station reçoit bien plus de propositions d’émissions qu’elle ne peut en accepter. Si certains bénévoles travaillent à distance, les interviews sont généralement réalisées dans les locaux de la rue des Fossés. Radio Rennes bénéficie aussi de la contribution de professionnels retraités, notamment d’anciens de France Bleu.

Une identité culturelle forte

Radio Rennes se définit comme une radio culturelle, de loisirs et sociale. Elle travaille en partenariat avec des institutions locales telles que la Protection judiciaire de la jeunesse, des établissements scolaires ou des écoles de langues. La station est aussi surnommée “la radio du livre”, offrant une large place aux auteurs et éditeurs, ce qui est de plus en plus rare dans les grands médias.

En matière d’audience, elle attire principalement un public de 30 à 60 ans, mais certains animateurs ou chroniqueurs littéraires et cinéphiles sont plus jeunes, autour de 25-30 ans.

Une radio locale à portée mondiale

Si Radio Rennes a su conserver son ADN, elle n’est pas restée figée. Elle diffuse aujourd’hui sur la RNT (radio numérique terrestre) et sur internet, ce qui lui permet d’être écoutée partout dans le monde. Gabriel Aubert insiste : il ne s’agit pas d’une simple adaptation mais d’un élargissement naturel des supports. Podcasts, streaming ou web radio sont des opportunités, pas des menaces.

Avec le temps, la station est passée de “radio bavarde” à une structure amatrice dans la forme, mais professionnelle dans le fond. L’exigence éditoriale s’est renforcée.

Une programmation différente et engagée

Radio Rennes ne diffuse pas de musique commerciale ou de “hit-parade”. Elle met en avant des artistes nationaux et régionaux souvent ignorés des grands réseaux, et elle le fait avec conviction.

À ce titre, elle a créé un classement mensuel : le COTA (Classement Francophone). Ce top met en lumière des artistes francophones émergents. Il est reconnu par la SACEM et permet aux artistes classés de percevoir des droits d’auteur. Un engagement unique en son genre parmi les radios locales.

Anecdote d’un combat pour l’antenne

Parmi les souvenirs marquants, Gabriel Aubert évoque un épisode de 1983 : la station était alors brouillée par une radio concurrente, Fréquence Numéro 1. Après des demandes restées lettre morte, 28 membres de Radio Rennes se sont rendus dans les locaux de la station fautive un samedi matin, ont coupé son émetteur — sans violence ni casse. Les forces de l’ordre sont intervenues, mais l’action est restée sans suite judiciaire. Aujourd’hui, cette radio n’existe plus. Radio Rennes, elle, est toujours là.

Un message fort pour la Fête de la radio

À l’occasion de cette fête nationale, Gabriel Aubert rappelle l’importance des radios associatives locales. Elles sont un lieu d’expression libre, de soutien aux artistes et de promotion des cultures locales. Il invite chacun à les (re)découvrir, pour écouter autrement, loin des formats standardisés et de la publicité omniprésente.

“Ceux qui écoutent Radio Rennes sont souvent fatigués par la publicité et recherchent une musique différente. Et ils la trouvent ici.”

 

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