10 octobre 2025
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[CITERADIO] – #CANETIENTPLUS – Interview de Caroline Joveneaux, directrice de Jeunesse et Habitat Alerte sur la Précarité de la Jeunesse et du Secteur – 10102025

Cette interview s’inscrit dans le cadre de l’émission spéciale dédiée à la mobilisation nationale du 11 octobre 2025, un événement lancé à l’initiative du mouvement associatif pour alerter sur la fragilisation du secteur. Notre invitée est Caroline Joveneaux, Directrice Générale de l’association Jeunesse et Habitat.
L’association Jeunesse et Habitat agit concrètement pour permettre aux jeunes de 15 à 30 ans de se loger. Elle accueille, loge et accompagne près de 3000 jeunes aux parcours très diversifiés (salariés, étudiants, apprentis, en insertion professionnelle ou sociale) dans la métropole de Tours et en secteur périurbain. L’association gère notamment un parc de près de 330 logements dédiés, et mobilise des conseillers habitat pour aider les jeunes à trouver des solutions.

Caroline Joveneaux détaille les difficultés économiques majeures auxquelles son association est confrontée, soulignant que le modèle économique associatif est fragilisé.
Le premier point critique est l’explosion des charges d’énergie. Bien que ce sujet concerne tout le monde, l’impact est majeur pour Jeunesse et Habitat car, gérant des résidences, l’association ne peut pas répercuter cette augmentation sur les jeunes, qui de toute façon, « ne pourraient pas les assumer ».
Mme Joveneaux révèle l’ampleur de ce choc financier :
« Pour vous donner un ordre d’idée, en gros, en 3 ans, c’est pour nous 500 000 € supplémentaires de charge d’énergie. Oui, c’est colossal. ».
Cette augmentation a “évidemment impacté de manière très importante notre trésorerie”. En parallèle, l’association subit également des suppressions ou baisses de subventions. Elle a notamment perdu une subvention de 35 000 € destinée à aider les jeunes dans leur recherche de logement.
La directrice insiste sur l’instabilité structurelle des financements publics, notamment le passage d’une logique de subventions pluriannuelles à des financements ponctuels via les appels à projet.
Pour porter une action, l’association doit constamment chercher une “multiplicité de financement”. Caroline Joveneaux illustre ce fardeau administratif en soulignant qu’elle gère « pas moins de 25 conventions financières annuelles différentes ». Cela implique de réaliser 25 demandes et autant de rendus de compte et de bilans chaque année, mobilisant ainsi un temps précieux qui pourrait être consacré aux publics accueillis.
Un autre point “très marquant” est le décalage de versement des subventions.
« Sur certaines actions qu’on porte, on peut ne les obtenir que plusieurs mois après leur démarrage. Là, typiquement, moi, je vais avoir des actions que j’ai démarrées depuis le mois de janvier. Donc, j’ai payé les salaires, les charges, […] et je ne vais avoir le versement de ma subvention que fin d’ année ».
Elle s’interroge : « Quel autre acteur économique accepte d’être considéré de cette façon ? ». Ces décalages mettent l’association à mal, la forçant à avancer les fonds.
Si les associations comme Jeunesse et Habitat sont fragilisées, l’impact retombe directement sur les jeunes.
« Fragiliser les associations comme les nôtres, c’est prendre quand même un risque inconsidéré de voir augmenter le nombre de jeunes à la rue ».
L’enjeu est clair : sans ces structures, des jeunes seraient contraints de stopper leur parcours d’insertion ou d’étude. À terme, cela dégrade la cohésion sociale et augmente la dépense publique. Si les restrictions budgétaires se poursuivent, l’association pourrait être contrainte de licencier des salariés et de vider son projet associatif de sa “substantifique moelle”.
« Si on n’a plus l’accompagnement socio-éducatif qui est possible, notre projet n’a plus aucun sens et donc notre association n’a plus de raison d’être non plus ».
Caroline Joveneaux insiste sur le fait que la jeunesse est une catégorie de population ayant des parcours particulièrement chaotiques, souvent liés à des ressources financières “très précaires, volatiles, voire totalement absentes”. Elle dénonce le fait qu’en France on est toujours sur de la « technique de saupoudrage » en matière de politique jeunesse.
Face à cette précarité inédite, la demande adressée aux pouvoirs publics est double:
1. Obtenir des financements pérennes qui s’inscrivent dans la durée.
2. Obtenir des financements décloisonnés qui permettraient d’éviter la recherche fastidieuse de 15 financements différents pour un seul projet.
Caroline Joveneaux souligne que la situation est si critique que des associations sont actuellement en train de disparaître. Jeunesse et Habitat, bien qu’étant une structure de près de 60 salariés œuvrant depuis 80 ans, voit sa pérennité “très en danger”.
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Si vous êtes un jeune (15-30 ans) en difficulté de logement ou en recherche d’informations, vous pouvez contacter Jeunesse et Habitat au 02 47 60 51.
La mobilisation nationale se tiendra ce samedi 11 octobre, notamment à Tours, au croisement de la rue du Commerce et de la rue Nationale, de 14h à 17h.
Interview de Caroline Joveneaux,
https://www.canetientplus.org/
http://www.asso-jeunesse-habitat.org/
Lilian Vetlé – Reporter radio
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